La confidentialité des médiations extrajudiciaires et judiciaires
La confidentialité de la médiation, ses exceptions, ainsi que ses avantages et ses risques présentés de manière claire et illustrée
Principe
En médiation extrajudiciaire ou judiciaire, la confidentialité[1] s’impose au médiateur, aux parties, à leurs conseils et aux tiers qui interviennent dans le processus[2].
Exceptions
L’état de nécessité
La confidentialité n’est toutefois pas intangible dans la mesure où un état de nécessité peut justifier d’y déroger moyennant le respect de conditions très strictes[3]. Ainsi, si des parties s’accordent en médiation sur l’enfouissement de substances toxiques dans le tréfonds d’un héritage situé dans une zone de captation d’eau, le médiateur (à l’instar de tout autre intervenant en médiation) doit mettre un terme à son intervention et dénoncer les faits au parquet. À l’inverse, si l’accord négocié par les parties vise à se soustraire à l’obligation d’obtenir un permis d’urbanisme pour certains travaux de minime importance, le médiateur doit s’assurer que les parties ont pleinement conscience de cette illégalité et, dans l’affirmative, mettre un terme à son intervention si les parties refusent de revoir leur position sur ce point, sans qu’il n’y ait a priori lieu de dénoncer les faits au parquet[4].
L’accord des parties
La confidentialité n’est pas d’ordre public
L’accord des parties permet de lever la confidentialité de tout ou partie de la médiation. L’ancien article 1728 du Code judiciaire précisait que la confidentialité peut être levée « pour permettre notamment au juge d’homologuer les accords de médiation »[7]. Si le législateur de 2018 a revu la formulation de cette disposition, il a confirmé sans ambiguïté que la confidentialité de la médiation n’est pas d’ordre public. Ce que nous défendions de longue date[8].
Avantages
La confidentialité est l’un des principaux atouts de la médiation. Elle permet aux parties de parler librement et de faire état de documents et d’informations qu’elles ne souhaitent pas divulguer à des tiers. Elle doit donc être strictement garantie. Nous ne pouvons, dès lors, que regretter une certain pratique qui consiste à reproduire sans nuance certains modèles de protocole qui prévoient, à tort, que ne sont confidentielles que les informations et les pièces « que les parties n’ont pas pu obtenir par ailleurs ». En effet, rares sont les documents ou les informations qu’une partie ne peut pas « obtenir par ailleurs ».
Risque potentiel
Nul besoin de prouver en médiation
La confidentialité peut présenter un certain risque lorsqu’une partie mal intentionnée communique une information ou un document dans le but de le rendre confidentiel. Il appartient, dès lors, au médiateur d’être particulièrement vigilant et strict face à d’éventuelles tentatives de manipulation du cadre. Soulignons, par ailleurs, qu’il peut s’avérer judicieux de ne produire aucun document en médiation, sous peine de le voir frapper du sceau de la confidentialité, et ce d’autant plus qu’il n’est a priori nul besoin de prouver dans le cadre du processus de médiation[5]. En tous les cas, il est indéniable que les actes et les documents publics par nature, au rang desquels figurent notamment les titres de propriété[6], ne deviennent pas confidentiels suite à leur communication et à leur examen en médiation.
Comment éviter toute éventuelle discussion quant au caractère officiel de certaines pièces ?
Les conseils veilleront à préparer un dossier de pièces inventorié qu’ils communiqueront officiellement à la partie adverse avant l’entame du processus de médiation (dont question à l’article 1728 du Code judiciaire).
Notes de bas de page
[1] C. jud., art. 1728 anciens.
[2] Le médiateur, les experts et les avocats conseils en médiation sont d’ailleurs soumis au secret professionnel.
[3] L’état de nécessité est une situation dans laquelle se trouve une personne devant commettre une infraction pour éviter un péril grave et imminent. Il suppose la réunion de conditions strictes. En premier lieu, il faut un rapport de proportionnalité entre le bien sacrifié et celui qui est sauvegardé. L’existence d’un péril grave et imminent est également requis. De plus, commettre l’infraction doit être nécessaire pour éviter pareil péril. Enfin, il faut que la partie n’ait pas créé par son fait la situation qui la met en état de nécessité. (P.-P. Renson, La médiation civile et commerciale : comment éviter les aléas, le coût et la durée d’un procès, Louvain-La-Neuve, Anthemis, 2010, p. 96).
[4] Sauf circonstances particulières, il faut conclure à l’absence d’état de nécessité en pareil cas.
[5] Dans certains cas, la divulgation de certaines informations et la production de certaines pièces peuvent s’avérer indispensables. Il en va ainsi, entre autres, dans les différends entre des maîtres d’œuvre et divers professionnels de la construction. Nous visons par là les entrepreneurs, les architectes et les ingénieurs en stabilité.
[7] C. jud., art. 1728, §1er.
[8] P.-P. Renson, « Les avocats et la médiation », in P.-P. Renson (dir.), Etats généraux de la médiation, Limal, Anthemis, 2015, pp. 91 à 116, n° 37.
[9] Ibid..